Une crise profonde gronde au sein de la Coordination Rurale [1]. Plusieurs cadres récemment débarqués dénoncent « l’extrême-droitisation » de la nouvelle direction, une stratégie  uniquement basée sur le scandale  et son absence de travail syndical concret.Celle-ci appelle à « sortir les fourches » en cas de gouvernement NFP, après que ce dernier ait inclus dans son programme un moratoire sur les méga-bassines et remporté les élections législatives. C’est dans ce contexte et après avoir apporté leur soutien au Rassemblement National que les dirigeants de la Coordination Rurale (CR) appellent leurs adhérents à se mobiliser contre le Village de l’Eau à Melle, le vendredi 19 juillet. Celui-ci réunit déjà des milliers de personnes. Le mouvement anti-bassines remet les points sur les I face aux clivages tronqués que s’attache à exacerber la CR entre agriculteurs-ices et écologistes. Il ne cédera pas aux intimidations, manifestera et appelle de nouveau à un moratoire sur les mégabassines pour ramener les conditions du dialogue et que les tensions cessent. La lutte pour les paysan-nes mérite mieux que d’aller encercler un village de l’eau en pleines moissons. Ce dont les paysan-nes ont besoin ce n’est pas de nouvelles chemises vertes ou d’apprentis miliciens, mais d’un syndicalisme de classe qui défendent leurs revenus face aux véritables accapareurs de la valeur du travail agricole (Avril, Ocealia, Terrena, crédit agricole, etc.).

1- L’appel à mobilisation des dirigeants de la Cordination Rurale repose sur une somme de fantasmes. Elle prétend « défendre les familles d’agriculteurs » contre une menace « écoterroriste » venue pour « saccager les fermes ». Ils inventent au passage purement et simplement des « exactions » contre des fermes qui auraient « déjà commencées cette semaine ». Pourtant la coordination anti-bassines a été trés claire : « nos mobilisations ne prennent pas et ne prendront pas pour cible les agriculteurs et leurs fermes », mais les ennemis réels des paysan•nes. Dans le système bassines, les agriculteurs sont les instruments et les fusibles des méga-coopératives et des multinationales qui les maintiennent dans une dépendance aliénante. C’est cela que nous irons dénoncer à La Rochelle samedi, au lendemain d’un pique-nique et de la marche pour un moratoire à Saint-Sauvant. 

2- Comme Darmanin, le Coordination Rurale  prétend imposer le récit binaire et tronqué d’un conflit entre agriculteurs et écologistes. Mais le mouvement anti-bassines est bel et bien un mouvement composé et d’agriculteurs et d’habitant•es des territoires directement concernés par la préservation des terres et des ressources en eau. Notre mobilisation est appelée cette année encore par plus de 120 organisations, dont plusieurs syndicats agricoles, et par de nombreux agriculteurs non syndiqués qui expriment la nécessité d’un autre modèle de production par leur présence active. 

3- La Coordination Rurale qui demande la fin des traités de libre échanges et la défense des exploitations moyennes préfère devenir un satellite du Rassemblement National. Ce parti climato-sceptique a voté pour ces même traités et pour la nouvelle PAC qui favorise les grosses exploitations. Cet hiver déjà la coordination rurale s’est réduite au rang de force supplétive de la FNSEA sans rien obtenir de significatif pour le revenu paysan et contre les accords de libre échange. Nous tenons à sa disposition la liste de nos ennemis communs. Il ne s’agit ni des écologistes, ni des immigrés, mais bien des patrons de la grande bourgeoisie agro-industrielle dont Arnaud Rousseau est l’exemple emblématique. La CR, syndicat aux relants poujadistes, propose une vision purement corporatiste des agriculteurs, les isolant à dessein du reste de la société et niant le besoin d’une bascule agro-écologique. A rebours de cette vision nous voulons participer à faire vivre une agriculture qui ne détruise pas les sols et la ressource en eau dont nos vies dépendent,une agriculture qui ne soit pas au service d’un système néo-colonial. Nous voulons une agriculture qui permette une juste rémunération des paysannes et paysans, tout en garantissant le maintien des petites et moyennes exploitations face aux prédations sociétaires.

4- La semaine du Village de l’Eau qui s’ouvre ce mardi aura, entre autres, pour objectif de pousser la refléxion et  de permettre les échanges sur la nécessaire adaptation du modèle agricole au changement climatique, le partage de l’eau et la défense des terres. Financées à 70% par de l’argent public, les méga-bassines permettraient à une minorité d’agriculteurs d’augmenter leurs prélèvements [2], alors que la majorité doit déjà se restreindre. Loin d’être un instrument de la souveraineté alimentaire française, elles permettront aux grosses entreprises de négoces en céréales de toujours plus exporter,  fragilisant au passage les systèmes agricoles des pays anciennement colonisés. Les mégabassines sont la dernière trouvaille d’un système, qui depuis 60 ans, prive les agriculteurs de leur autonomie et les livre à la merci des acteurs de l’amont (semenciers, fournisseurs d’engrais et de pesticides, équipementiers) et de l’aval (coopératives, industries agro-alimentaires) de la filière. Un système qui incite les agriculteurs à s’agrandir en s’endettant ou à disparaitre, et les force à adopter des pratiques souvent néfastes pour les milieux comme les habitantes, telles que l’usage de pesticides. Les mégabassines ne permettrons pas à l’agriculture française de s’adapter au changement climatique, elles aggravent au contraire des inégalités déjà criantes entre les exploitations, inégalités qui seront encore exacerbées par le manque d’eau dans les années à venir.  

6- Au côté de nombreuses associations, élu.es locaux et nationaux et même du président de l’Agence de l’Eau, nous appelons à un moratoire qui seul pourra apaiser les tension et faire que le dialogue puisse s’établir. Les intimidations gouvernementales et la menace de la CR qui prétend assaillir le Village de l’Eau ne pourrons nous empêcher d’exprimer notre oppostion aux méga-bassines. Nous appelons ainsi les milliers de manifestants attendus à ne pas céder aux pressions de la CR ou du gouvernement, et à nous rejoindre au Village de l’Eau. Nous appelons également tous les agriculteurs qui s’opposent au modèle qui les écrasent et qui ne veulent pas se laisser instrumentaliser par l’extrême-droite à nous rejoindre !

[1] « Ambiance de purge à la Coordination rurale », l’Opinion, 14 juillet 2024 : https://www.lopinion.fr/economie/ambiance-de-purge-a-la-coordination-rurale

Rédaction

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