Une contribution de Bertrand Geay au débat qui s’amorce après les élections législatives avec le résultat que l’on connaît maintenant. Le texte est aussi disponible au format PDF ci-dessous.

Dans le texte ci-dessous, les inter-titres sont de Web86.

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Après les législatives, faire vivre notre projet politique à l’échelle locale

Les succès rencontrés par le Nouveau Front Populaire et la majorité relative qu’il obtient à l’Assemblée nationale sont une formidable nouvelle, qui place toute la gauche face à d’énormes responsabilités. Les syndicats et le mouvement associatif ont également un rôle décisif à jouer dans cette période. Au-delà, pour toutes celles et ceux qui veulent barrer la route à l’extrême-droite et ne supportent plus la dérive politique de ces dernières années, l’implication collective sera indispensable, partout où il est possible d’agir, dans les entreprises et les services publics, les quartiers ou les villages.

Localement, nous avons vécu une incroyable mobilisation électorale, victorieuse dans la première circonscription de la Vienne et particulièrement dynamique dans la deuxième circonscription, même si la campagne diffamatoire et manipulatrice de Sacha Houlié, Aurélien Bourdier et Alain Claeys leur permet d’emporter la victoire. De réunions en événements publics et en porte-à-porte, l’engouement était palpable. Chaque jour, de nouveaux sympathisants et sympathisantes nous rejoignaient, parmi lesquelles de nombreux jeunes, des femmes, des personnes racisées, et pour finir près de 300 militantes et militants se déployant dans l’ensemble de cette deuxième circonscription. Les relations avec les autres forces du Nouveau Front Populaire sont restées placées sous le signe de la coopération et, dans la deuxième circonscription, la collaboration rapprochée avec le PCF s’est révélée aussi efficace que fraternelle.

Ensemble, nous avons à nous approprier cette nouvelle situation politique et à faire fructifier les liens créés ces dernières semaines.

Le premier enseignement de ce scrutin,

c’est le renforcement de l’ancrage électoral du Rassemblement national dans l’ensemble des groupes sociaux et dans toutes les régions. Le travail de légitimation de l’extrême-droite a joué à plein, orchestré de longue date par les intellectuels réactionnaires et les groupes médiatiques dominants, et conforté par les initiatives politiques des « républicains » et des macronistes. La mobilisation contre le RN a été utile et, au-delà des élections, il nous faudra travailler au renforcement de la solidarité antifasciste, contre le déchaînement des actes racistes, sexistes et homophobes.

Mais nous avons aussi à travailler sur les divisions qui traversent la classe ouvrière et l’ensemble de la population. Le développement de l’électorat RN va de pair avec l’accroissement d’un clivage social qui pèse profondément sur nos tentatives de réunir le salariat et les catégories modestes autour d’un projet progressiste. La désespérance produite par les délocalisations industrielles, le recul des services publics et l’effondrement du pouvoir d’achat n’en finissent plus de faire grossir l’agrégat réactionnaire, nationaliste et trumpiste. Dans ce contexte, il va de soi que nous nous tenons aux côtés de ceux qui sont les plus opprimés, par le travail, par leurs conditions d’habitat et par la racisation. Mais cela ne saurait faire oublier qu’il nous faut aussi arracher au ressentiment une partie au moins des classes populaires et des petites classes moyennes qui votent RN, celles qui sont désespérées de l’école, de la lutte collective et de la vie en commun.

Le mouvement insoumis reste un pôle de rassemblement pour une véritable alternative politique, sociale, écologique et démocratique.

Nous avons pu une nouvelle fois le mesurer à travers l’engouement suscité par notre campagne dans la deuxième circonscription. Que ces nouveaux militants et militantes soient en affinité avec le style clivant de la direction de notre mouvement ou qu’ils en soient critiques, ils et elles ont en commun d’adhérer aux grandes lignes de force de notre programme et à la cohérence de nos engagements sur le terrain, loin des luttes d’égos et des pratiques bureaucratiques. En dépit des péripéties propres à chaque élection, et malgré les violentes campagnes de dénigrement dont nous sommes l’objet, nous ne pouvons qu’être frappés par l’existence durable de ce courant d’opinion en phase avec la société de notre temps. Il nous revient de mener désormais deux chantiers de front : celui de la mutation démocratique de notre mouvement à l’échelle nationale et celui d’une construction démocratique de masse à l’échelle locale, intégrant la jeunesse et les quartiers populaires.

Le rassemblement de la gauche et des écologistes a une nouvelle fois montré son utilité.

Au-delà de la mécanique électorale, il répond à une aspiration d’une large partie de nos électorats, exaspérés par le spectacle de la division. Nous en connaissons les limites. Chacune des forces en présence cultive l’ambition d’être le centre de gravité de la recomposition en cours et alterne entre moments isolationnistes et moments unitaires. Et même les plus engagés d’entre nous se retrouvent périodiquement placés en spectateurs et spectatrices du feuilleton de l’union et de la désunion. C’est là une conception archaïque de la politique. Sans travail en commun à la base, rien de solide et de durable ne sera construit. Débattre et agir ensemble, en ouvrant grand les portes aux nouveaux et aux nouvelles venues, est à la fois une nécessité démocratique, une condition de notre efficacité, et le moyen d’approfondir les débats qui demeurent entre nous, qu’il s’agisse des raisons qui ont conduit au désastre du mandat de François Hollande ou des prises de position jugées trop clivantes de la direction de notre mouvement.

A Poitiers, cette construction unitaire à la base doit nécessairement se conjuguer avec le projet que nous souhaitons porter pour les municipales de 2026. Le bilan de l’équipe Poitiers collectif est pour le moins contrasté et il existe un sérieux risque que cette équipe soit battue par le conglomérat prétendument « socialiste » ou de « gauche », constitué par A. Claeys, A. Bourdier et S. Houlié. Dans ce contexte, la position la plus juste et la plus efficace pour gagner est de travailler à une offre politique qui ouvre une nouvelle perspective pour Poitiers et Grand Poitiers, prenant résolument en compte les besoins et les exigences portées par les habitants et les habitantes, dans leur diversité. Un projet fait d’écologie populaire, de démocratie sociale et de solidarité concrète, qui implique des collectifs d’habitants, des syndicalistes et des bénévoles associatifs. Une offre politique qui barre la route aux revanchards de l’ancienne gauche sans s’enfermer dans les contradictions de l’actuelle équipe municipale. Un projet qui parvienne finalement à rassembler l’ensemble de la gauche, en proposant une pratique différente du pouvoir, dans une articulation étroite entre nos ambitions sociales, écologiques et démocratiques.
L’urgence, c’est de faire vivre notre projet politique à l’échelle locale, sans outrance et sans ralliement, avec la certitude tranquille que, loin des caricatures, nous représentons un courant qui apporte une réponse aux attentes ou à l’exaspération de nombre de nos concitoyennes et concitoyens. Avec la volonté d’en découdre avec le pouvoir de la finance, des multinationales qui délocalisent et de l’agro-industrie qui pille nos ressources, mais avec le souci de convaincre par l’exemplarité de nos pratiques, en montrant que, plus que jamais, nous sommes une force résolument fédératrice.

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Bertrand Geay

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Bertrand Geay

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