L’exposition photographique « Corps social en action », conçue par un groupe de recherche de l’université de Poitiers, s’est installée au centre culturel Plazara ! de la ville de Pampelune, en Espagne. Elle sera visible jusqu’au 15 septembre.

Comment cette exposition a-t-elle vu le jour ?

Éric Puisais, philosophe : Il y a deux ans, un groupe de recherche s’est constitué dans le cadre d’un projet intitulé “Équilibre des pouvoirs1”. Il réunit des spécialistes de plusieurs disciplines qui s’intéressent à la crise des institutions, aux nécessaires rééquilibrage des pouvoirs et aux différentes formes de mobilisations collectives.

Ludivine Thouverez, hispaniste : À la même époque, j’ai rencontré le photographe Joxe Lacalle Huarte, qui a travaillé pour le journal Egin, au Pays basque, durant les années 90. Joxe Lacalle a été le témoin de dizaines de mobilisations, dont on a très peu parlé en France… D’où l’idée de les faire connaître à travers une exposition organisée à la Faculté de Lettres et Langues de Poitiers en avril dernier…

De quelles mobilisations est-il question ?

L.T. : Certaines, comme celles des squatteurs et des agriculteurs, portent sur le droit à un logement accessible et un salaire digne. On retrouve ce type de revendications dans d’autres pays. D’autres sont en lien avec l’aménagement du territoire et l’écologie, à une échelle plus locale. De nombreuses campagnes de désobéissance civile contre le service militaire ont également eu lieu en Espagne dans les années 80-90. Sans oublier le mouvement altermondialiste et anti-G8.

E.P. : D’une certaine façon, les photographies de Joxe Lacalle illustrent les crises de la démocratie, les tensions entre un corps politique –que les pouvoirs publics tendent à considérer comme une unité gouvernable– et un corps social multiple, hétérogène, qui par sa présence dans l’espace public entend rappeler qu’il devrait être associé aux décisions politiques. Elles montrent aussi comment les corps de cette multitude accomplissent ce que Judith Butler appelle une “performance incarnée” et se retrouvent exposés à la répression.

Comment l’exposition s’est-elle retrouvée à Pampelune ?

L.T. : L’exposition organisée à Poitiers a suscité l’intérêt du centre d’archives Justo de la Cueva, qui envisage de digitaliser les 175.000 négatifs du photographe. Alors, avec sa représentante Zuriñe de la Cueva, nous avons décidé de nous associer. Après l’UFR Lettres et Langues et Plazara!, nous aimerions que l’exposition circule dans d’autres lieux, notamment dans la Vienne.

Quel a été l’accueil à Pampelune ?

L.T. : La réponse du public a été fantastique! 200 personnes par jour le week-end dernier et entre 60 et 90 en début de semaine. Nous espérons que cela continue!

E. P. : Évidemment, Joxe Lacalle est très connu à Pampelune, mais son travail n’avait jamais fait l’objet d’une exposition. Cette collaboration entre une entité civile locale et un groupe de recherche étranger a reçu le soutien du gouvernement de Navarre.

1 Ce projet de recherche a bénéficié du soutien financier d’UP-SQUARED, projet France 2030, PIA4 “Excellences sous toutes ses formes” (ANR-21-EXES-0013).

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Rédaction

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