Une soirée de l‘IEPOP Poitiers du 01 février 2018
« Il se trouve de longue date de nombreuses voix pour analyser et dénoncer le potentiel liberticide [l’extension indéfinie et mal contrôlée du domaine de la répression]. Mais peut-être faudrait-il commencer par pointer son caractère foncièrement irresponsable. On peut continuer d’alimenter indéfiniment cette fuite en avant répressive. On peut aussi considérer qu’il est temps de prendre la question pénale au sérieux. En commençant, notamment, par cesser de concéder aux artisans de la surenchère sécuritaire la prétention au réalisme dont ils aiment à se parer. »
(Ces extraits du livre de Vincent Sizaire, Sortir de l’imposture sécuritaire, Paris, La Dispute, 2016, 136 pages, 13 €, sont issus du site https://www.contretemps.eu/sizaire-imposture-securitaire/)
(Étienne Douat à gauche, Vincent Sizaire à droite)
« Car il ne s’agit nullement de pourfendre ce laxisme systématiquement prêté à ceux qui observent ce mouvement d’un regard critique, mais bien de courir après les vieilles lunes autoritaires de l’ancien droit pénal, en faisant de la répression arbitraire et démesurée la solution magique à un phénomène délictueux qu’on persiste à penser comme extraordinaire. En ce sens, l’inflation normative sans précédent à laquelle nous avons assisté en matière pénale au cours des vingt-cinq dernières années constitue un formidable aveu d’impuissance répressive. »
« Éclairer toute sa dimension archaïque et réactionnaire suppose en outre de lui opposer un modèle répressif dont l’efficacité bien comprise est fondée sur préservation de la liberté du citoyen. Et de redécouvrir l’outil assurant cette alchimie : le droit à la sûreté, clé de voûte de la philosophie pénale républicaine depuis la fin du XVIIIème siècle [car il ne faut pas] confondre, de bonne ou de mauvaise foi, les notions de sûreté et de sécurité. »
« La sécurité, c’est ce que le Roy promet à ses sujets. La sûreté c’est l’engagement réciproque des citoyens de faire primer le droit sur la force dans les situations de conflit. »
« Ce concept [de sûreté] permet de condamner dans un même mouvement la violence privée et la violence publique des agents de la répression qui prétendraient s’affranchir du cadre, toutes deux également sanctionnées par la loi pénale. Quand la promesse de sécurité conduit les autorités répressives à s’abaisser au niveau de violence et d’arbitraire de ceux qu’elles prétendent combattre, la sûreté exprime au contraire l’idée que l’on ne peut efficacement sanctionner la méconnaissance des lois que si l’on est soi même irréprochable à ce titre. »
« La sûreté n’est donc pas la promesse déraisonnable d’une société sans crime mais, en revanche, d’une société où le crime ne paie pas car chacun sait, auteur comme victime, que toute atteinte aux droits et à la liberté d’autrui est prohibée et sera à terme réprimée. C’est ensuite la garantie que, quelle soit le statut ou la situation sociale du responsable, toute violation de loi et tout abus de pouvoir seront dûment sanctionnés. C’est enfin l’assurance de ne pouvoir être inquiété par la puissance publique que si elle justifie d’un manquement avéré à la loi et après avoir eu la possibilité de faire valoir équitablement son point de vue. »
À lire absolument :
Vincent Sizaire, Sortir de l’imposture sécuritaire, Paris, La Dispute, 2016, 136 pages, 13 €