La démarche est hasardeuse ! Le théâtre historique de Poitiers, commercialisé avant même la décision du recours contre la vente au promoteur qui doit le détruire, reste pourtant « sauvable » et garde toutes ses changes d’être promis à un avenir culturel. Le combat de ceux qui ne se résolvent pas à voir un théâtre transformé en commerces quand on manque de scènes dure depuis plus de 6 ans. Il a connu des victoires qui l’ont conforté et, s’il n’a pas encore abouti, c’est qu’il se heurte à un entêtement du maire qui refuse de reconnaître ses erreurs politiques. Voilà que, sans attendre que la justice se prononce, on l’offre à l’appétit commercial ! Et ce qui est savoureux, si ce n’était cynique, ce sont les termes choisis par le cabinet d’affaires pour en faire la promotion : le théâtre y est décrit comme un « bâtiment historique et emblématique du centre-ville bénéficiant d’un emplacement exceptionnel ».
Oui, c’est bien d’un bâtiment historique dont il s’agit, qui aurait dû bénéficier d’une protection à la hauteur de ce qu’il est, le dernier théâtre encore en état d’Edouard Lardillier, joyau de l’architecture des salles de spectacle du XXème, bénéficiant du verre églomisé de Pansart qui rappelle sa vocation de théâtre.
C’est bien d’un bâtiment emblématique qu’il s’agit, cher à la mémoire des poitevins, qui a su recueillir pour le défendre pas moins de 8000 signatures.
C’est bien d’un emplacement exceptionnel dont il est question qui permettrait, si la scène revit, de remettre de la culture au cœur de la ville !
680 m2 de commerce supplémentaire dans un coeur de ville qui se sclérose, à qui on déroule le tapis rouge, à qui on offre un hall d’accueil décoré d’un verre églomisé unique en France comme enseigne commerciale, voilà toute l’ambition d’une équipe vieillissante qui s’entête dans les vieilles recettes et refuse de prendre le virage d’un monde dont le salut appartient au citoyen et moins que jamais au consommateur.
Jacques Arfeuillère