Communiqué commun de BNM 79 / 86, Confédération Paysanne, Soulèvements de la terre, Solidaires, CGT 79, FSU 79
La manifestation de Sainte-Soline a été un moment historique dans les mobilisations paysannes et écologistes de ces dernières années. Elle a marqué autant par les dizaines de milliers de personnes qui y ont participé que par sa détermination à mettre fin aux chantiers de bassines.
Après le 25 mars, tout le monde dans ce pays avait entendu parler des méga-bassines et de la manière dont elles accaparent l’eau des nappes souterraines. Un an après, il est devenu impossible de cacher que ces infrastructures sont une maladaptation au changement climatique qui bénéficie à une infime minorité d’agriculteur•rices, aux dépens de la majorité des autres paysan•nes, du reste de la population et des écosystèmes. Depuis le 25 mars dernier, nul•le ne peut ignorer que ces bassines servent à maintenir un modèle destructeur et qu’elles repoussent la mise en oeuvre des transformations agro-écologiques nécessaires pour protéger les paysan•nes, l’eau et la terre dont l’agriculture dépend, pour garantir la production d’une alimentation saine et la préservation de la biodiversité.
L’ampleur de la mobilisation de Sainte-Soline a résulté d’une suite de mobilisations populaires qui ont redonné espoir dans la capacité collective à défendre les biens communs. C’est pourquoi le gouvernement a fait le choix délibéré de brutaliser ce mouvement. Le 25 mars 2023 a marqué le passage d’un seuil dans la violence que l’État est prêt à déployer face à des manifestations paysannes et écologistes. Elle a révélé jusqu’où il était prêt à aller pour protéger les profits des patron•nes de l’agro-industrie aux dépens de la population. Le 25 mars, de manière préméditée, le gouvernement a fait le choix d’étouffer le mouvement de défense de l’eau par la terreur armée. Dans les semaines et mois qui ont suivi, il a grossièrement menti pour camoufler ses fautes. Il a employé tous les moyens pour criminaliser les manifestant•es comme les organisations et pour les faire condamner par la justice. Il a tenté de dissoudre ce qui lui faisait face, tout en en préparant le terreau pour de nouvelles lois liberticides.
Mais, la neutralisation des luttes paysannes et écologistes n’a pas eu lieu. Bien au contraire !
La solidarité après Sainte-soline a été sans faille. Les observateur•rices de la LDH ont démontré que le gouvernement avait délibérément fait le choix d’envoyer deux personnes dans le coma et d’en mutiler des dizaines d’autres pour défendre un cratère « coûte que coûte », en assumant le risque de tuer des manifestant•es. Les rapporteur•rices de l’ONU ont dénoncé le fait que la France soit le seul pays d’Europe à faire usage d' »armes de guerre contre des manifestants écologistes ». Des rassemblements ont eu lieu partout en France et dans de nombreux pays du monde en soutien aux blessé•es de Sainte-soline.
Les Soulèvements de la Terre n’ont pas été dissous mais se sont démultipliés. De nouvelles actions massives et déterminées se sont déployées à travers le pays contre l’autoroute A69, les extensions de carrières Lafarge, l’artificialisation de terres agricoles… Pendant ce temps, en Deux-Sèvres, les habitant•es en lutte ont plusieurs fois fait de nouveau tomber les grilles des chantiers de bassines.
De nouvelles études scientifiques ont démontré l’impact nocif des bassines. Même le BRGM reconnait n’avoir pas pris en compte le changement climatique dans le rapport qui avait servi à justifier la construction de ces infrastructures financées par l’argent public. C’est aujourd’hui la Cour des Comptes qui remet en cause leur viabilité. Le tribunal de Poitiers a fait annuler en septembre 15 nouveaux projets de bassines en estimant qu’elles étaient trop dommageables pour les milieux naturels. Une quinzaine d’autres, dont bon nombre de constructions illégales, ont été désamorcées. À ce jour, seul un chantier de bassine, transformé en forteresse ultra-sécurisée, a abouti à Mauzé-sur-le-Mignon. Mais trois chantiers sont encore en cours dans les Deux-sèvres, dont celui-de Sainte-Soline. D’autres menacent de démarrer dans divers autres départements si nous ne leur faisons pas barrage à temps.
L’État et les entreprises qui portent les projets de bassines (Coop de l’eau 79,SCAG dans le 86…) refusent d’entendre la contestation populaire. Ils rejettent l’ouverture d’un réel dialogue sur un juste partage de l’eau. Ils continuent de passer en force sans légitimité démocratique : il nous faut donc obtenir le moratoire sur les bassines nous-mêmes. Malgré les pressions politiques et judiciaires, de nouvelles mobilisations pour le partage de l’eau et contre le système des méga-bassines sont donc appelées par de larges coalitions, d’associations, syndicats et ONG.
En Auvergne, une Rando festive et déterminée pour la défense de l’eau aura lieu le 11 mai contre les 2 giga-bassines du géant semencier Limagrain. Dans le Poitou, un village international de l’eau et des manifestations massives auront lieu du 15 au 21 juillet.
Un an après Sainte-Soline, nous – paysan•nes, écologistes et syndicalistes – sommes plus que jamais uni•es pour faire concrètement obstacle au ravage social et environnemental, et préserver les communs.
Nous n’oublierons jamais les blessé•es du 25 mars 2023 et la nécessité de nous protéger collectivement des violences policières. Nous ne cesserons pas pour autant de manifester et d’agir.
No Bassaran !