Comme plusieurs personnes qui ont envoyé aux député.e.s de leur circonscription un appel à ne pas voter pour l’article 24 de la loi dite de « sécurité globale » vous avez sûrement reçu une réponse, notamment celle de Sacha Houlié, député de la 2ème circonscription de la Vienne qui réagit sur cette proposition de loi.
Comme vous le savez, ce dernier s’est abstenu sur le vote du 24 novembre portant en première lecture sur la totalité de la proposition de loi. Dans un courrier reçu hier, il argumente sur les raisons qui l’ont conduit à s’abstenir et elles sont intéressantes… car elles auraient pu tout aussi bien l’amener à voter contre, un certain nombre de ses collègues n’étant pas allé.e.s aussi loin dans l’explication critique de leur opposition au texte ! Mais on a des pudeurs à trop vouloir se distancier de ce que l’on a « adoré ».
Dans la première partie de son courrier, S. Houlié vante les mérites de plusieurs aspects de cette loi (recrutement de policiers, collaboration inter-services, précisions sur les missions de la « sécurité privée », etc…)
Mais, sur pas moins de 6 articles (21, 22, 23, 24, 25 et 30A) il apporte des réserves importantes. En particulier sur l’accès direct aux enregistrements utilisés comme preuve et la remise en cause de leur neutralité au bénéfice de l’une des parties, (art. 21) l’utilisation des enregistrements des images des caméras individuelles des policiers (art. 22), la question de la réduction de peine interdite s’il y a préjudice aux force de l’ordre (art. 23), l’apport réel de l’article 24 (et sa « proximité » avec l’article 25) qui devrait « objectiver le délit créé et en exclure les journalistes » .
Sans qu’il soit précisé, concernant les journalistes, de qui on parle puisque Darmanin lui-même a tenté d’introduire l’accréditation des journalistes auprès des autorités pour couvrir des manifestations et a remis en cause la réalité même du travail de la presse en réservant cette reconnaissance à la possession d’une carte de presse, ce que beaucoup n’ont pas.
Enfin et concernant le délit supposé de « l’intention de nuire » , on peut considérer que certains policiers ont pris les devants en appliquant cette disposition avant même la mise en œuvre de la loi : le journaliste de Brut, Rémy Buisine en a fait les frais lundi soir pendant l’expulsion et le matraquage de migrants place de la République à Paris. (https://www.brut.media/fr/news/un-camp-de-refugies-violemment-evacue-a-paris-0f0ff7c8-5e4c-4447-aa82-cbc1f857c834)
Si vous souhaitez aller dans le détail, prenez le temps de lire le courrier d’explication de S. Houlié : https://sachahoulie.fr/2020/11/24/ma-position-sur-la-proposition-de-loi-relative-a-la-securite-globale/
Comme relevé précédemment, pas moins de 50 député.e.s LREM se sont dissocié.e.s de la majorité présidentielle à l’occasion du vote du 24 novembre : 10 absent.e.s, 30 abstentions et 10 votes en contre. Sur un groupe initial de 314 député.e.s en 2017, LREM est tombé à 271, soit 43 élu.e.s de moins en trois ans ! Après l’épisode « En même temps » du début du quinquennat de Macron puis maintenant le passage au « Ni à gauche, ni à gauche », nul doute que ce positionnement droitier gène aux entournures pas mal de député.e.s LREM élu.e.s sur « le positionnement humaniste » supposé du président de la République… Et cela se traduit en conséquence par un effritement permanent du groupe parlementaire.
Pour terminer et à mesure que la mobilisation grossit, la dernière initiative du gouvernement provoque dans la majorité parlementaire des réactions dévastatrices ! Le premier ministre a annoncé la mise en place d’une commission « indépendante » chargée de réécrire l’article 24 et passe ainsi par dessus le vote – controversé – du parlement. Certains au sein de LREM vivent cela comme une humiliation de se voir déposséder du travail parlementaire. On peut se demander ce que nos député.e.s locaux pensent de ces manœuvres, bien à l’image de l’action du gouvernement : navigation à vue, manipulation et opportunisme permanent.
D. Leblanc