Un beau témoignage sur la manifestation du 21 novembre à Poitiers :
« Nous sommes en guerre. Le chef de l’État l’a déclaré et répété : c’est la guerre, comme en 40. J’avais alors 2 ans et je me souviens du bruit des bombardements. La consigne était de courir aux abris. Nous y sommes allés une fois mais j’ai tellement hurlé que nous n’y sommes pas retournés. Mon premier acte politique a donc été de choisir la liberté, tandis que se déversaient des tonnes de bombes…
L’ennemi aujourd’hui est plus discret, les gouvernants et leurs commanditaires investissent toujours dans l’armement mais aussi et plus sournoisement dans les manipulations génétiques et les techniques de contrôle. Un documentaire contesté lève le voile sur leurs manœuvres, provoquant un grand malaise. Certes, il y a indécence mais de quel côté ??? La plus récente indécence, c’est la loi « Sécurité Globale » votée par l’Assemblée : filmer les violences policières devient un délit !
À bas bruit, une chape de plomb se met en place et la Ligue des Droits de l’Homme nous appelle à réagir ce samedi 21 novembre 2020…
Par ce bel après-midi d’automne, docilement masqués, nous convergeons vers la place qui sert de parvis à l’Hôtel de Ville de Poitiers. Elle est immense et morne – le précédent maire l’a privée de ses arbres et de la fontaine – nous sommes plus d’un millier, mais ce n’est pas assez pour faire masse : il reste de la place pour circuler entre des groupes qui ne fusionnent pas. Le masque fait qu’on n’est pas trop sûr de se reconnaître mais quand même : « Mariette ! ! ça fait 30 ans qu’on ne s’est pas vues! ? »
Ce qui se dit dans le porte voix, nous le savons déjà. Pour aller à la source du problème, il faudrait démonter le cycle de la peur : Quelles sont les peurs justifiées ? Quelles sont celles qui remontent à l’enfance ? Des adultes parfois terrorisent pour se faire obéir et l’enfant qui aime l’adulte se met à aimer l’obéissance, tout en rêvant du moment où il pourra à son tour terroriser. Pour les « peureux-autoritaires » il ne s’agit plus de supprimer un danger ou de s’en protéger mais de le grossir : il peut alors servir de prétexte pour exercer un pouvoir, en passant par l’infantilisation de ceux que l’on veut soumettre.Seule la liberté peut venir casser ce cycle et les « peureux autoritaires » la redoutent plus que tout . Elle met en péril le seul équilibre qu’ils puissent concevoir : l’ »équilibre de la terreur »…
Les pancartes essayent bravement de nous faire rire… mais « c’est pas drone » ! Je retiens « notre sécurité c’est notre solidarité ». J’ai prévu de dire un mot mais je n’ose pas.
Une musique arrive du centre de la place : un orchestre a surgi de nulle part. C’est une belle musique et des danseurs trad lui trouvent un rythme d’avant deux. Vous ne croyez pas que je vais résister à la danse ?? J’intercepte Antoine pour un balancer, ça met un peu de confusion mais aussi du sourire et moi j’ai reçu l’impulsion qui me manquait : je me dirige vers les marches de la Mairie. C’est la fin de la manif, avant de lire la liste – longue – des signataires de l’appel, on me tend le micro. Des enfants me regardent avec curiosité : heureusement, je parle pour eux :
“ Nous sommes ici pour défendre notre bien commun le plus précieux : c’est la LIBERTÉ qui distingue le vivant de l’inerte mais tous n’en font pas le même usage.
Il y a ceux qui se croient libres quand ils jouissent d’un pouvoir sans limite. Ils sont poussés par l’insatiable démesure que les anciens Grecs appelaient Ubris. Ils asservissent les autres et font croire que la « sécurité » passe par leur violence. Cette « liberté- »là c’est le libéralisme économique, « le renard libre dans un poulailler libre ». Leur sécurité globale est cause d’insécurité : ce n’est qu’un leurre qui détruit toute liberté vraie.
D’autres plus prudents disent « ma liberté s’arrête où commence la tienne», c’est une conception limitée de la liberté, le résultat d’une tractation, d’un marchandage, des pratiques valables pour partager des biens limités.
Mais la vraie liberté est d’un autre ordre. Bakounine dit qu’elle s’accroît dans le partage : plus tu es libre, plus je suis libre et je ne peux pas être libre si tu ne l’es pas.
Dante dit cela pour nos désirs : nous sommes malheureux parce que nous mettons nos désirs dans ce qui diminue dans le partage. Il nous conseille de désirer ce qui croît dans le partage : la compréhension, l’amour, le rire, la danse.. À l’opposé des désirs factices de consommation que la « fabrique du consentement » veut nous faire entrer dans le crâne !
Décrétons la fin de la compétition et le début de l’entraide. Fédérons les bonnes volontés, reprenons le contrôle de nos vies. Il y a à Poitiers un Forum Social Départementalqui ne demande qu’à renaître. Inventons et partageons une nouvelle liberté. »
…
Je repars dans la foule, pas sûre d’avoir touché ne serait-ce qu’une oreille mais une dame d’origine africaine me dit « très bien ! » Alors je reprends courage : bon sang mais bien sûr, Dante et Bakounine ont raison ! Les drogués d’Ubris sont prêts à asservir et saigner le monde pour s’offrir quoi ? une éternité transgénique. Vous imaginez plus morne ennui ???
Nous, rien qu’avec une rencontre d’ancienne amitié, un air de danse, une parole de liberté, nous sommes capables de faire jaillir des sourires qui à leur tour font jaillir l’eau du bonheur ! Tout ça à partir d’un rien qui s’accroît dans le partage, comme un grain de sènevé, une étincelle de liberté, un balancer d’avant deux…
Nous allons partager et semer ces biens minuscules : ils vont se multiplier, transformant le cycle de la peur en cycle de la liberté !
Mais si ! c’est la vie qui nous le dit !
Je suis à mon tour interceptée par un jeune : « vendredi après-midi, c’est la fin de l’enquête d’Utilité Publique sur les bassines à Champagné le sec – D’accord ! On aura besoin d’eau pour arroser nos graines de liberté, j’y serai ! À vendredi ! »
nonna Maia »