À Poitiers, veillons à ce que la lutte contre la pauvreté ne soit pas la grande absente des élections municipales

Si à l’échelle nationale, le seuil de pauvreté s’élève approximativement à 14% et qu’il tend à se stabiliser voire à diminuer depuis 1996 (cf. Figure 1), la situation est malheureusement bien différente à Poitiers

La récente publication par l’INSEE du portrait social de la France 2019 est venue nous rappeler que près de 9 millions de personnes vivent en dessous du seuil de pauvreté dans notre pays, avec moins de 1000€/mois (cf. Figure 1), et cette réalité sociale devrait nous convaincre de l’enjeu majeur que constituent ces élections municipales pour œuvrer à éradiquer la pauvreté.

Figure 1 – Indicateurs de pauvreté de 1996 à 2017

Développer des politiques municipales qui fassent droit à l’urgence sociale avérée par ces données statistiques doit constituer une priorité. Cette situation est en effet d’autant plus inacceptable que la pauvreté, qui touche durement les familles monoparentales (cf. Figure 2 et note 2), s’insinue aussi, de manière marquée, dans le quotidien des enfants.

Figure 2 – Taux de pauvreté selon la composition du ménage

Les résultats 2019 de l’enquête annuelle sur la pauvreté menée par le secours populaire témoignent de cette situation (cf. note 3). « Chez les 8-14 ans :

  • 51% estiment qu’il y a « beaucoup de personnes pauvres » en France (39% en 2012)
  • 62% des enfants interrogés témoignent de leur crainte de devenir eux-mêmes pauvres un jour (58% en 2012)
  • 41% déclarent que d’autres écoliers ne mangent pas à leur faim ou de manière variée (+10 points depuis 2015) »

Ces résultats témoignent de contextes familiaux en dessous du seuil de pauvreté où, comme le souligne encore le Secours populaire, « 63% d’entre eux ont de réels problèmes avec leurs factures d’énergie et avec leurs dépenses de logement ».

Autant d’angoisses quotidiennes qui ne font qu’ajouter aux inégalités qui vont jusqu’à celle en termes d’espérance de vie quand plus de 12 années séparent « les hommes riches » des plus pauvres (cf. Figure 4 et note 5).

Figure 4 – Espérance « Riches – Pauvres »

Si à l’échelle nationale, le seuil de pauvreté s’élève approximativement à 14% et qu’il tend à se stabiliser voire à diminuer depuis 1996 (cf. Figure 1), la situation est malheureusement bien différente à Poitiers. Comme les quotidiens locaux ont pu le rappeler (cf. note 4), « 22,4 % des habitants de Poitiers vivent sous le seuil de pauvreté avec moins de 1.000 euros par mois. Un taux qui atteint 37 % dans les quartiers de Beaulieu et des Couronneries, 47 % à Bel-Air et même 51 % aux Trois-Cités ».

Dans cette campagne municipale poitevine, nous pouvons certes nous féliciter du bon classement de Poitiers parmi les villes où il fait bon vivre ou bien encore, choisir de débattre si certains étaient pour ou contre le financement par Grand Poitiers de 5 millions d’euros pour la création de la salle de spectacles ARENA-Futuroscope, il n’en demeure pas moins vrai que la priorité est ailleurs.

L’urgence sociale doit se muer en une réponse politique. Les initiatives, comme l’inscription du quartier des Couronneries dans le cadre du Nouveau programme national de rénovation urbaine ou la demande d’intégration de Poitiers au sein de l’expérimentation nationale Territoire Zéro chômeur de Longue Durée, sont de premiers actes politiques mais ils demeurent insuffisants.

Face à la situation sociale que nous révèlent ces statistiques pour Poitiers, les électeurs sont en droit d’attendre des programmes politiques qui placent l’éradication de la pauvreté au cœur de leurs engagements de campagne et où le mot de solidarité possède un sens concret et programmatique.

William Berthomière

Note 1 : Voir INSEE, France : Portrait social, édition 2019 :

Selon l’INSEE, l’intensité de la pauvreté est définie selon « l’écart relatif entre le niveau de vie médian de la population pauvre et le seuil de pauvreté. Plus cet indicateur est élevé et plus la pauvreté est dite « intense », au sens où le niveau de vie des plus pauvres est très inférieur au seuil de pauvreté. »

Note 2 : Selon les résultats du recensement général de la population 2015, sur les 8 millions de familles avec enfants mineurs, 23 % sont des familles monoparentales. Cette part a doublé depuis 1990, où elle s’élevait à 12 %.

Note 3 : Cf. Convergence-Secours populaire, n° 365, Septembre-Novembre 2019

Note 4 : Voir les articles :

Près d’un Poitevin sur quatre sous le seuil de pauvreté (publié le 22/08/2018)

787.000 Néo-Aquitains vivent sous le seuil de pauvreté (publié le 01/02/2019)

Note 5 : cf. Rapport sur les inégalités en France 2019 publié par l’Observatoire des inégalités

Rédaction

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