Demain soir l’EMF propose une conférence au titre évocateur : « L’écriture inclusive, ennemie du féminisme universaliste » par nathalie heinich.
On imagine déjà les arguments sur la binarité du genre à maintenir absolument comme protection des luttes féministes, en totale négation des trans, non binaires et toustes autres gender fuck.
Le discours est connu, et n’est pas nouveau dans les féminismes. Affirmation des genres ( pensée féminine, écriture féminine, défense de l’hétérosexualité, transphobie) contre dépassement et abolition des genres ( féminisme matérialiste, homosexualité politique, fluidité des genres).
D’ailleurs, le court texte qui présente la conférence prétend rappeler cette histoire des conflits intra féministes , en la ré écrivant tout à son avantage, n’hésitant à inverser les rôles ou modifier les géographies des mouvements.
« Il n’existe pas une seule mais au moins deux conceptions du féminisme : l’universaliste, qui prône la suspension de la différence des sexes lorsqu’elle n’est pas pertinente, et la différentialiste, qui prétend l’affirmer en toutes circonstances. La première a été portée historiquement par le féminisme français, la seconde par le communautarisme américain. C’est de cette dernière que procède l’injonction à l’écriture inclusive (ou plutôt « excluante ») qui, contrairement à ce que prétendent ses partisans, est loin de représenter le tout du féminisme. Et surtout, elle contrevient profondément à la tradition de l’universalisme républicain, héritière des Lumières. » (présentation de la conférence)
On passe sur l’écriture inclusive qualifiée gratuitement au passage d’ « excluante », sans aucune explication, mais comme la dame travaille au CNRS elle a sûrement raison.
D’ailleurs regardons le pedigree de nathalie heinich.
En 2003, elle s’oppose au PACS pour les homosexuels.
En 2013, elle s’oppose au mariage pour tous. Elle est logiquement qualifiée d’homophobe par plusieurs sociologues.
En 2018, elle signe la tribune « Cent intellectuels contre le séparatisme islamiste » , publiée le 20 mars 2018 dans Le Figaro.
En 2021, elle publie le tract Gallimard Ce que le militantisme fait à la recherche ou elle défend la « contamination de la recherche par le militantisme ». Une manière polie de défendre le mythe de l’islamo gauchisme gangrénant la recherche.
Elle fait d’ailleurs partie de l’Observatoire du décolonialisme, un collectif décrit comme un « média d’opinion » anti-décolonial par Arrêt sur images, qui, après le refus par le CNRS de le mener, avait publié un rapport sur « l’islamogauchisme » en 2021. Étude reprise par Le Point, Le Figaro ou Valeurs Actuelles.
On comprend très bien l’infusion des pensées d’extrême droite dans sa vision d’un féminisme essentialiste : unicité de la communauté à défendre (les femmes en tant que mythe, genre indéboulonnable) et peur de l’ennemi intérieur (les trans, n’étant que des hommes, et pour toujours essayant d’infiltrer les luttes féministes). Cette pensée nauséabonde, réactionnaire, excluante et discriminatoire n’a rien à faire dans l’espace public.
J’appelle évidement au boycott, ou au chahutage de la dite conférence de demain, ou mieux encore, son retrait par l’EMF s’il veut conserver un peu de son sérieux dans sa mission de contribuer « à une meilleure compréhension, par toutes et tous, de notre monde complexe et mouvant. »
Corbi.
PS : pour poursuivre sur nathalie et ses idées d’un autre siècle, plusieurs billets sur les blogs Médiapart.
Lettre ouverte à Nathalie Heinich
« Ce que le militantisme fait à la recherche » : réponse de Nathalie Heinich
Le communiqué de l’Espace Mendès France :
L’Espace Mendès France est interpellé depuis plusieurs jours concernant la conférence du mardi 29 novembre donnée par Nathalie Heinich, sociologue, directrice de recherche émérite au CNRS et membre de l’EHESS (École des hautes études en sciences sociales). Cette programmation est à l’initiative du laboratoire Cerca (Centre de Recherches sur la Cognition et l’Apprentissage) de l’Université de Poitiers qui nous a sollicité comme souvent pour accueillir cet événement dans le cadre du CPER (Contrat Plan État-Région) Insect.
L’Espace Mendès France est un lieu d’accueil pour la recherche et la mise en débat de problématiques sociales et scientifiques, l’université et les différents acteurs et actrices de la Région nous sollicitent en ce sens depuis longtemps.
Par ailleurs, nous déplorons l’accusation d’homophobie et d’islamophobie à notre encontre, faisant fi de l’ensemble de la programmation menée ces dernières années sur les thématiques en sciences humaines et sociales et pensée avec différents laboratoires et organismes des universités tout comme une multitude d’acteurs et d’actrices de la société civile.
L’Espace Mendès France, association loi 1901 créée en 1989, reste et restera un lieu ouvert à toutes et tous pour aborder et mettre en débat les enjeux de notre société dans toute sa complexité.
Après les incidents survenus, la déclaration de la rédaction de web86.info
EMF ni homophobe ni islamophobe
Un article publié sur le site contributif web86.info a critiqué les propos et la teneur des conférences d’une invitée universitaire de l’Espace Mendès France.
Cette invitation isolée n’empêche pas web86.info de confirmer son choix de relayer depuis des années le travail de l’EMF pour la connaissance scientifique, le débat réfléchi et l’émancipation notamment des femmes.
Nous avons appris qu’après le débat il y a eu des dégradations sur le mobilier de l’EMF. Est-ce en lien avec le débat du soir ?
Quoi qu’il en soit, nous condamnons fermement ces dégradations commises à l’EMF.
web86.info continuera de relayer sur le site le travail essentiel del’EMF.
La rédaction de web86.info