Depuis quelques années l’État s’est défaussé sur les mairies pour certains documents administratifs (passeport, carte d’identité…).
À vitesse grand V les préfectures « dématérialisent », informatisent l’accès à certains documents administratifs (carte grise, naturalisation, permis de conduire, etc.). Ces procédures « en ligne » sont complexes et rebutent nombre d’usagers.
La presse locale – qui montre là encore l’utilité et la légitimité du journalisme – nous informe que « des sociétés privées propose aux particuliers de leur faire leur démarche numérique pour obtenir la carte grise ».
Pourquoi en est-on arrivé là ?
Très classiquement il s’est agi pour l’État comme pour n’importe quelle entreprise capitaliste de remplacer le « travail vivant » disait Marx (les travailleurs et travailleuses) par le « travail mort » (des machines). Les machines ça ne fait pas grève, ça travaille 24h/24, ça ne tombe pas malade en période de grippe, ça obéit sans bargouiner.
Une partie du boulot fait précédemment par les fonctionnaires de la préfecture n’est plus assurée, notamment celle du conseil, de la transformation de l’information personnelle en information administrative et de la saisie des informations.
Le travail de saisie est effectuée maintenant par … les usagers eux-mêmes ! Chacun-e a pu vérifier que les formulaires à remplir en ligne sont longs et souvent complexes et qu’il faut leur accorder un certain temps de… travail. Ce travail est fourni gratuitement par nous-même, usagers, en remplacement de celui, rémunéré, des agents de la préfecture.
La partie du travail « conseil et la transformation de l’information personnelle en information administrative » se trouve maintenant privatisée, assurée par des entreprises privées dont parle l’article de la presse locale. Les salarié-es de ces entreprises privées gagnent moins que des fonctionnaires et ont un statut précaire. L’usager paye personnellement ce service (35 ou 39 euros) alors qu’avant c’était le budget de l’État (surtout par l’intermédiaire des impôts) qui payait les fonctionnaires de la préfecture.
En général, à l’occasion de ce genre de « dématérialisation », l’entreprise capitaliste – et l’État aussi – en profite pour supprimer des postes et pour intensifier le travail de celles et ceux qui restent.
Et tout ce bon argent économisé par l’État, il va où ?
Une partie reste dans les poches bien fournies des plus riches dont les fortunes échappent pour une bonne partie à l’impôt. Une autre partie va dans ces mêmes poches mais sous forme de CICE et autres cadeaux somptueux aux ultra-riches (cf le dernier livre des Pinçon-Charlot).
Bref, la privatisation ce n’est pas forcément la disparition de l’État (qui, notons-le au passage, est de plus en plus autoritaire) mais une marchandisation de tout et/ou d’une partie des services.
Pascal Canaud
Post Scriptum : le même raisonnement peut-être tenu pour une multitude de Services publics comme par exemple l’orientation scolaire (interview sur web86.info)
« Les services publics ont une tendance de plus en plus forte à être sous-traités au privé, et macron sous-traite son grand débat à une boite privé au nom anglo-saxon, Opinionway.
Le problème a l’air assez général. La SNCF ne veut plus vendre de billets et les fait vendre par les buralistes. Hier chez Décathlon il n’y avait plus de caissière permanente, il fallait saisir soi-même ses achats, avec une fille pour aider éventuellement les clients ! » PLM